Connue sous le surnom de Duda, Maria Eduarda Abdala José est la fille cadette d’un couple d’ouvriers de l’entreprise Whirpool, anciennement Multibras. Le père ingénieur était d’origine libanaise et venait de l’intérieur de l’Etat du Paraná, la mère, de descendants italiens, travai...Continuar leitura
Connue sous le surnom de Duda, Maria Eduarda Abdala José est la fille cadette d’un couple d’ouvriers de l’entreprise Whirpool, anciennement Multibras. Le père ingénieur était d’origine libanaise et venait de l’intérieur de l’Etat du Paraná, la mère, de descendants italiens, travaillait dans les ressources humaines dans l’Etat de Santa Catarina. Cette petite famille fut élevée dans un immeuble de Joinville, ville industrielle. Duda et sa sœur reçurent quotidiennement les attentions maternelles lors des jeux ou pour aller à l’école. Comme les sœurs avaient deux ans et demi d’écart, elles se trouvaient souvent en désaccord jusqu’à l’adolescence. La mère a arrêté de travailler quand sa sœur ainée naquit, mais par la suite elle s’intéressa à la musique à tel point qu’elle devint musicienne et professeur de violon.
Petite, Duda était timide à l’école, exigeante avec elle-même, sans pour autant se souvenir que ses parents le fussent pour ses résultats. Voyant sa sœur aller à l’école, elle en eut aussi très tôt l’envie. Elle eut du mal à se sentir à l’aise avec les autres élèves et sa mère l’accompagna les premiers jours d’école maternelle. Elle se souvient de l’amour de ses parents : son père travaillait, ramenait l’argent à la maison et protégeait ses filles, sa mère s’occupait du quotidien du foyer
Elle se décrit comme une enfant fragile, contractant facilement des maladies virales et des allergies, ce qui donna beaucoup de travail à ses parents. Elle avait une vie sociale avec les autres enfants de l’immeuble, elle jouait au ballon, faisait du skate avec les garçons et jouait à la Barbie avec sa sœur.
Duda se décrit encore comme une jeune fille tranquille, ayant le goût des études, mais aussi des difficultés à interagir avec les autres. Ses parents la surveillaient beaucoup et elle commença seulement à sortir davantage après ses dix-huit ans. Mais ce qu’elle aimait le plus, c’était passer du temps avec ses amis autour d’une guitare et d’une discussion agréable. Après le collège, elle s’est passionnée pour la musique à l’école Arte Maior et pour les activités musicales avec ses amis : les concerts, les rencontres, les événements avec des bandes de rock l’attiraient fortement. Elle eut peu d’amoureux, une histoire négative pleine de jalousie se termina rapidement. Au moment de l’entretien, elle parla d’un petit ami très proche qu’elle fréquentait depuis cinq ans et avec lequel elle avait des projets et de la complicité.
Tout au long de son récit, la timidité est un ressort de son histoire. Elle avait peur de présenter son travail à l’école, peur de se tromper et sa mère allait à l’école pour expliquer ses difficultés. Elle se sent en insécurité mais elle a déjà bien changé et mesure combien elle s’est améliorée. Elle ne comprend pas d’où viennent toutes ses injonctions ; elle dit : « je ne me rappelle pas de ma mère exigeant des choses de ma part, je ne me souviens pas de cela parce que j’ai toujours été exigeante avec moi-même, je ne rappelle que ma mère le fût pour les devoirs scolaires ou quelque chose de la sorte, je ne me souviens pas, j’ai déjà essayé mais rien ne me vient en tête ».
Comme elle se sentait en insécurité, se faire des amis semblait appartenir au domaine de l’inconnu, de la nouveauté. Après avoir franchi ces barrières, Duda se montrait une amie facile, souple, avec laquelle tout le monde aimait passer du temps. A la puberté, lorsqu’elle eut ses menstruations, elle se dit qu’elle ne voulait pas grandir, mais sa mère ne prêta pas grand attention à ce sentiment. Plus tard, lorsque ses parents s’installèrent aux Etats-Unis où elle vécut proche de son oncle et de sa tante, elle s’aperçut qu’elle avait grandi. Elle devait prendre sa vie en main, aller à la faculté et sa propre exigence la stressa beaucoup.
Elle affirme que le modèle paternel concernant la cuisine prit tout son sens lorsqu’arriva le moment de choisir un cursus de licence. Le même goût pour la cuisine lui fit choisir des études en gastronomie et elle ajoute : « j’ai connu un mouvement qui a attiré mon attention, le Slow Food, qui revendique une alimentation plus saine, plus propre. Cette question a attiré mon attention et j’ai voulu suivre ce cursus ». Mais à la fin de celui-ci, la sclérose en plaques apparut et les plans changèrent : « J’écrivais mon mémoire de licence et mon stage était très stressant quand une crise est survenue ». Elle raconte qu’elle sentait la moitié de son corps de manière différente comme si un côté était tombé. Elle appela ses parents pour connaître les symptômes de la labyrinthite de sa mère et alla à l’hôpital avec son petit ami. C’était un samedi, elle était invitée à une fête de mariage, mais elle préféra aller auparavant aux urgences pour vérifier sa tension. Elle parle de ses moments d’incertitudes et de perte de confiance quand elle devait attendre ses résultats médicaux. Mais ils apportèrent la nouvelle de son hospitalisation et l’annonce de son traitement. Elle se sentit perdre ses forces.
Au cours des six mois d’hospitalisation, plusieurs choses arrivèrent : les mots du médecin « syndrome clinique isolé » n’expliquaient pas grand-chose. Mais pendant un examen par résonnance, le technicien lui dit : « vous avez une sclérose ». Choquée et sans information, j’effectuais des recherches sur ce qu’était une sclérose en plaques. Elle dit qu’elle en fut effrayée, et sa source initiale d’information vint d’une actrice, Claudia Rodrigues. Elle lut ensuite diverses informations sur des cas ayant un épisode de crise, ce qui
la calma dans un premier temps. Mais d’autres informations surgirent et toutes ces incertitudes sur le diagnostic et sur son mémoire de fin d’études la stressèrent à nouveau.
Toute sa famille se mobilisa à ce moment-là. Les parents vinrent des Etats-Unis, l’oncle, la grand-mère proche, tous étaient inquiets. A la fin de son cursus, qui marquait le début du traitement, elle partit en voyage avec sa famille. Les attentions qu’elle lui apporta tout au long de sa vie, que Duda décrivit, s’intensifièrent, la soulageant des démarches administratives pour parvenir à obtenir le médicament Fingolimode. Elle se sentait gênée quand sa famille parlait de son traitement comme si elle était absente. C’était l’hiver en Amérique du Nord, elle se sentait mieux. Sans visa, elle dut pourtant rentrer au Brésil et pensa à poursuivre ses études en master ainsi qu’à travailler dans son domaine. Mais les plans élaborés ne se réalisèrent pas comme prévus, car elle découvrit que la chaleur de l’été était une ennemie. Tout comme le furent la chaleur de la cuisine et le poids des casseroles, ce qui rendit ses projets de carrières inconcevables.
Ce fut un moment de très grande frustration qui se déroula dans un contexte d’anxiété et de prescription d’antidépresseurs qu’elle refusa de prendre. Elle prit un autre chemin et commença à chercher d’autres thérapies pour traiter son angoisse et l’aider dans ses choix de carrière. Elle testa une thérapie orientale et décida d’analyser et de réfléchir sur ses émotions et ses comportements.
Elle en retira l’interprétation
suivante: « La signification dans la médecine chinoise, ce que cela signifie émotionnellement, toutes les personnes qui suivaient mon état à l’époque voulaient comprendre… Ah ? Tout cela avait-il un caractère émotionnel ? Qu’est-ce qui influençait ou non ? J’avais toujours reçu beaucoup de soutien de leur part, des professionnels de santé également. Aussi j’étais plus encline à réfléchir sur moi-même de cette manière : ah, tout ceci n’est pas que physique, il y a une part émotionnelle qui vient de moi ».
Elle chercha d’autres emplois plus en lien avec des tâches administratives mais par manque d’expérience ou à cause de réalités du marché du travail, rien ne fonctionna. Toujours en réfléchissant sur elle-même, elle décida de reprendre ses études en administration.
Ses souvenirs sont chargés de la bienveillance ses parents, de la force de leur volonté et de leur honnêteté, ce qu’elle résume ainsi : « Ils sont sortis de nulle part, de nulle part littéralement, ils n’avaient rien et tout ce qu’ils ont pu construire a été obtenu avec énormément…énormément de respect et d’honnêteté, et ceci je l’ai eu moi aussi, vous savez ? ».
A partir de ce modèle, elle envisage un possible futur dans le secteur de l’alimentation : «je me vois travailler dans l’alimentation mais dans la partie administrative, dans mon entreprise, et plus tard je me vois donner des cours, c’est une chose que je voudrais faire, et je me vois le faire à présent, comme cela, réellement, si… En adéquation…A présent, je parviens à me projeter».Recolher